Au Café-rencontre, on parle librement !

Régulièrement, des personnes porteuses de handicap, des proches, des accompagnants… se retrouvent pour un temps de partage et de débats dans le café du cinéma Utopia de Saint-Ouen-l’Aumône. Les échanges y sont très libres et très profonds… Echos.

Voilà ! La rentrée est faite ! Et bien qu’étant en petit nombre (huit personnes), ce mercredi 13 septembre 2023, c’est toujours avec joie que nous nous retrouvons ! Ce jour-là), il est proposé aux participants de décrire, à partir d’un événement marquant quelles sont leurs attentes pour l’année qui vient. 

Cécile : « J’ai participé avec mes enfants au pélé VTT fin août, qui dure 1 semaine (voir leur chaine Youtube). C’est une grosse organisation ! Environ 150 jeunes collégiens de 12 à 15 ans y participent. Eux, les pédalants, portent des T-shirts blancs. Tous les membres de l’organisation portent des T-shirts de couleurs différents suivant leur rôle. Il faut qu’ils soient reconnaissables tout de suite. Moi, je n’ai pas pédalé, mais mes enfants si… »

Une question est posée : « Y a-t-il des jeunes en situation de handicap qui participent ? Il existe des tandems adaptés ou des vélos qui peuvent pousser un fauteuil roulant. »

Cécile : « Non, ce n’est pas prévu. Le fait de pédaler n’est pas la seule difficulté. Les jeunes dorment sous tente, par terre. Et il faut qu’ils soient assez autonomes. »
« Cela se termine par la montée de la rue Thiers à Pontoise, sous la cathédrale. C’est impressionnant ! J’y suis allée à chaque fois que mes enfants ont participé, et cela m’émeut beaucoup. Il y a la messe, et une animation, avec les remerciements aux différentes équipes et aux pédalants. Il y a aussi une chorégraphie, préparée par les animateurs. Cette année c’était sur l’hymne du FRAT 2023, du groupe BeWitness (= Sois témoin). Mais, à Saint Maclou, il n’y avait pratiquement que les parents des pédalants et des membres des équipes. Dans ma paroisse, on n’en a pas parlé… C’est vraiment dommage, pour une fois que des jeunes se mettent en mouvement ! Cette jeunesse a besoin que l’on soit là pour eux. »
« Alors, ma question est : qu’est-ce qu’on fait pour les jeunes, dans l’Eglise et dans la société ?  Même pour les bénévoles, il y avait des besoins. Il n’y avait pas suffisamment d’encadrants, et il y a eu une demande aux derniers moments. C’est comme cela que j’ai participé. »

Isabelle : « Mon époux et moi sommes allés en vacances à Pau, et nous avons passé une journée à Lourdes. Quelque chose m’interroge : où est la vraie Foi ? Avant d’aller au sanctuaire, nous sommes allés dans une autre église. Il y avait un groupe de jeunes Chinois, qui barraient l’escalier d’entrée, y compris sur la rampe dont j’avais besoin pour monter. Nous n’arrivions pas à communiquer par oral, mais nous avons expliqué par gestes… personne n’a bougé ! Et même le prêtre auquel nous avons réussi à expliquer le problème n’a rien fait… Quand on est catholique, agir ainsi ! Je suis allée aux piscines. J’ai été très bien accueillie par les hospitaliers. Mais pas par le public, où il y avait des valides ! Certains m’ont regardée avec haine, parce que, comme personne handicapée, je leur passais devant ! Alors, où est la vraie Foi ? Il serait peut-être temps que les catholiques reviennent aux valeurs que nous avions autrefois 

Réactions de participants au Café Rencontre :  

« Même au pèlerinage de Lourdes, les jeunes ne sont pas venus saluer les personnes malades. »

«  Et lors de la célébration d’envoi avec louange pour tout ce que nous avons vécu, il a été proposé à tous de venir sur l’estrade pour une danse improvisée incluant tout le monde. Tous les jeunes sont descendus et ont commencé à gesticuler dans tous les sens. Il a fallu que je fende cette foule avec un fauteuil roulant, et que d’autres me suivent, pour que les personnes en situation de handicap puissent vraiment être incluses. »

Isabelle : « Lourdes, c’est devenu une usine ! Par contre, j’ai vécu une chose vraiment positive durant ces vacances. Il y a eu une grève surprise dans les TER alors que nous avions nos billets pour aller visiter Bayonne. Rien n’était prévu pour remplacer et le premier train était à midi. Cela ne valait vraiment pas le coup. Je suis allée voir la dame du guichet. Elle nous a dépannés : alors que nos billets n’étaient pas remplaçables, elle nous a eu 2 billets dans un TGV qui passait plus tôt, sans supplément ! » 
« Je reviens sur Lourdes : quand on est à l’étranger, on s’habille pour entrer dans une église ! Mais là, dans le sanctuaire, il y avait des gens qui sont habillés n’importe comment ! On dirait qu’ils sortent de la piscine municipale ! Il faudrait que l’Eglise s’empare à nouveau de certaines valeurs, même pour les touristes, même pour le vestimentaire ! »

Réactions de participants au Café Rencontre :  

« Tous les lieux religieux sont aussi des lieux touristiques. Pour les personnes qui sont dans les Pyrénées, Lourdes fait partie des lieux à voir. Ils ne sont pas là parce que c’est religieux, mais parce que c’est un lieu à voir. Mais, autrefois, à Notre Dame de Paris, il y avait un sacristain qui demandait à ceux qui entraient de se couvrir convenablement… »

« Dans un autre domaine, non religieux, mais touristique… Ma sœur demeure à Trouville. Dès le mois de mai, tous les résidents reçoivent un courrier, leur demandant de se rappeler que ce sont les touristes qui font vivre la ville et qu’il faut les laisser faire ! Les touristes ont tous les droits ! Les résidents en ont assez et attendent le mois de septembre avec impatience. »

« C’est la question du surtourisme qui se pose actuellement. Et à Lourdes, c’est pareil. Les pèlerins font vivre le sanctuaire, mais les touristes font vivre la ville. »

« Rappelons-nous que le mouvement « Foi et Lumière » est né, il y a 50 ans, parce que les familles avec des enfants en situation de handicap n’étaient pas acceptées dans les hôtels, et à peine plus dans le sanctuaire ! »

Jacqueline : « Moi aussi, je suis allée à Lourdes cet été, au mois d’août. Avec le groupe Saint Laurent qui avait organisé une semaine avec La Pierre d’Angle. Il y avait beaucoup de monde : 1200 personnes. Nous, nous étions logés à l’Hospitalité. On a fait des choses intéressantes. Vus un film sur les prisonniers, pique-niqués dehors tous les soirs. Mais les handicapés, on ne les laissait pas passer au self ! Il a fallu s’organiser pour que les personnes handicapées puissent manger ! »

Réactions de participants au Café Rencontre :  

« 1200, cela veut dire qu’il y a beaucoup de groupes La Pierre d’Angle ? »

« Oui, d’un peu partout en France. On s’est présenté les uns aux autres. »

«  L’idée qui vient, c’est peut-être qu’il faudrait faire connaître ce mouvement qui est peu connu ! Parce que les personnes en précarité, dans l’Eglise, c’est comme les personnes handicapées, comment sont-ils, ou pas, accueillies ? »

Jacqueline : « On a aussi fait un « yoga du rire » ! Et aussi une frise de mots en plein air sur l’esplanade. Et à la veillée finale chaque groupe était invité à présenter ce qu’il fait dans l’année, de façon ludique. »

Elodie : « Je suis allée au Portugal, dans mon pays. Mon papi était malade. Mais il va mieux. C’est la deuxième fois que je vais au Portugal. C’était à Lisbonne et il faisait très chaud, je n’arrivais pas à dormir. Nous sommes allés à Fatima aussi. Ma mère a mis un gros cierge… »
« Demain je travaille, comme tous les jeudis… Il y a une dame qui est venue à la maison. Pour voir si la maison est adaptée pour moi, si je vivais seule… Elle parlait de me trouver autre chose. Mais moi, je veux continuer à vivre avec ma famille. »

Thérèse : « Je suis allée en famille, en Bretagne. Il faisait assez froid et nous sommes beaucoup restés à l’intérieur, à jouer à des jeux de société. Le souvenir le plus fort que je garde, c’est celui de l’arrière-grand-mère, dont on va fêter les 104 ans prochainement. Elle est triste, parce que depuis quelques temps, elle a mal aux jambes, et elle ne peut plus danser les danses bretonnes ! Elle est contente d’être en famille. Ses proches essaient de lui conserver toute son autonomie. Ils viennent souvent. Mais le dimanche, il n’y a personne pour l’emmener à la messe ! Elle était contente que j’arrive pour que je l’y emmène. Parce que c’est très important pour elle. Et à la sortie de la messe, plein de paroissiens l’ont entourée, lui ont dit combien ils étaient contents de la revoir… Cela me pose question : combien de personnes sont isolées et ne peuvent pas participer à la messe du dimanche ? J’ai fait un appel pour du covoiturage. Seules trois personnes ont répondu, et pas pour tous les dimanches, seulement de temps en temps et pour les grandes fêtes. C’est compliqué, et beaucoup ne savent pas « comment prendre » les personnes âgées, handicapées… Mais ce sont des personnes comme les autres ! Quels mots pouvons-nous trouver pour retenir l’attention ?  On ne leur demande pas de s’engager à vie ! Mais de prendre une demi-heure avant la messe pour aller chercher ces personnes, et de rentrer une demi-heure plus tard. Comment trouver les mots ? Comme baptisés, nous sommes tous prêtre, prophète et roi ».

Réactions d’une participante au Café Rencontre :  

« Le handicap, la maladie, c’est comme la solitude, cela fait peur ! »

Thérèse : « Mais j’ai eu une grande joie. Une personne s’est présentée pour rejoindre l’équipe du Service Evangélique des Malades, et c’est quelqu’un qui sera un bel apport pour l’équipe. Elle fera ses visites le dimanche, pour porter la communion, si les personnes le désirent.

Gilles :  « A la dernière rencontre de l’équipe de pastorale pour et avec les personnes handicapées, dont je fais partie avec Any, nous avons eu un débat sur le handicap au sein de l’Eglise. J’insiste : il y a des choses à faire ! Et ces témoignages nous montrent qu’il y a à faire dans nos paroisses. Je me suis investi à pousser des fauteuils roulants, à aller chercher des personnes âgées pour les conduire à la messe. C’est contraignant, c’est vrai ! D’autant que j’aime aller à la messe à pied ; c’est mon temps de méditation. On arrive quand même à trouver des relais sur des actions ponctuelles… » 
« Tout cela, c’est une problématique d’attention à l’autre ! Par exemple, les gens qui viennent au sanctuaire de Lourdes en maillot de bain, c’est leur droit ! Mais ceux qui viennent pour prier, c’est aussi leur droit d’être choqués par cette façon d’être… L’amour du prochain, c’est la capacité à se mettre à la place de l’autre. Comment l’autre voit les choses ? Quel est son point de vue ? Cela ne veut pas dire qu’on va le partager ! Qui écoute qui ? Le niveau d’empathie, d’écoute de l’autre est faible. Alors que le besoin de parler est important actuellement, chez beaucoup de gens ! Que cela soit bas dans la société, c’est déjà grave ! Mais dans l’Eglise ! L’Eglise dont le message c’est l’amour mutuel, que l’on n’écoute pas l’autre, c’est quand même paradoxal ! Masi il faut aussi que les personnes handicapées elles-mêmes présentent leurs besoins, formulent leurs demandes. On ne peut pas les comprendre s’ils ne sont pas présentés. Mais si on demande, les autres se sentent « obligés » de répondre ! Il existe donc une pression sociale pour que les demandes ne soient pas exprimées ! »
« Le côté positif c’est qu’on est tous pareils ! tous les mêmes ! C’est « moi d’abord » ! Et pour les personnes handicapées, chez lesquelles il y a aussi des bisbilles d’un type de handicap à l’autre, chacune pense toujours que c’est son handicap qui est le plus lourd à porter ! On a du mal à écouter l’autre, on se regarde d’abord soi-même. Mais qu’est-ce que Jésus dirait ? »

Septembre 2023

 
CONTACTS

Café rencontre :
Cécile Lavernhe
cecilelavernhe4@gmail.com

Et si vous nous rejoigniez ?
Ces rencontres au café sont ouvertes à tous : personnes en situation de handicap, quel qu’il soit, accompagnateurs familiaux, professionnels, ecclésiaux.. ou simples paroissiens intéressés par cette problématique du handicap…
Voici les dates 2023-2024 des cafés-rencontres au café du cinéma UTOPIA de Saint-Ouen l’Aumône, de 15h à 17h, Les :

  • Mercredi 11 Octobre
  • Mercredi 8 Novembre
  • Mercredi 13 Décembre
  • Mercredi 10 Janvier 2024
  • Mercredi 07 Février
  • Mercredi 13 Mars
  • Mercredi 24 Avril
  • Mercredi 22 Mai
  • Mercredi 19 Juin.

3 décembre 2023 :
La journée internationale pour les personnes handicapées

Jeunes Unicef

A la fin de notre rencontre, Gilles et Any ont présenté la journée internationale pour les personnes handicapées. Elle a lieu tous les ans le 3 décembre. Et cette année, c’est un dimanche. Nous sommes donc fortement sollicités par l’équipe nationale de pastorale du handicap à célébrer cette journée.
Sur notre diocèse, nous souhaitons que ceci ait lieu dans les paroisses. Beaucoup disent qu’il n’y a pas de personnes en situation de handicap parmi les paroissiens… Mais parce que ceux-ci, pour différents raisons, techniques comme des marches à monter par ex. ou à cause du regard des fidèles qui sont dérangés par leur présence, leurs réactions… la plupart ne viennent pas à la messe ! L’équipe diocésaine demande donc à chaque personne qu’elle rencontre si elle accepte que ses coordonnées soient données à sa paroisse afin que celle-ci les sollicite pour une participation active à une célébration adaptée le 3 décembre.
Mais l’équipe diocésaine souhaite également que soient réalisées de courtes vidéos avec des personnes en situation de handicap. Ces vidéos seront diffusées sur le site du diocèse.
L’idée, c’est de sortir les personnes en situation de handicap de leur invisibilité.


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