
L’art de célébrer :
les postures de la liturgie (partie 2)
L’« art de célébrer » passe aussi par une juste expression du corps. Marcher en procession, se prosterner, garder le silence ou bénir : ces gestes, souvent discrets, manifestent la foi de l’assemblée et l’aident à entrer plus pleinement dans le mystère célébré. Tâchons ainsi de redonner du sens à ces gestes que nous faisons parfois machinalement.
Dans un premier article, nous avons évoqué les trois principales postures : se tenir debout, s’asseoir et s’agenouiller (voir encadré ci-contre). Ici, nous évoquerons brièvement d’autres postures comme marcher en procession, l’utilisation des mains, le baiser, le silence, la prostration. Tâchons ainsi de redonner du sens à ces gestes que nous faisons parfois machinalement. Ajustées et harmonieuses, ces postures participent à la beauté de la liturgie et de nos célébrations.
Marcher en procession
La marche est constitutive de notre vocation. Jésus nous rend la capacité de marcher : « Lève-toi et marche » Mt 9,5. « Allez annoncer (…) ce que vous entendez et voyez (…) les boiteux marchent » (Mt 11,5). Il nous permet de nous mettre à sa suite. Avec Lui, l’Église est un peuple en marche.
Nous pouvons souligner les différents moments où l’on « processionne » : les processions annuelles (le mercredi des Cendres, les Rameaux, la Vigile pascale…) mais aussi les processions de nos célébrations dominicales. Nous nous mettons en marche pour marcher avec et vers Dieu :
- Procession d’entrée, exprime le mouvement de l’Église, en marche avec et par le Christ, vers le ciel,
- Procession des offrandes, le peuple s’unit en esprit à ceux qui s’avancent vers l’autel,
- Procession de communion où les fidèles se déplacent pour aller à la rencontre.
Si simples qu’ils paraissent, les gestes posés pendant la messe tracent un chemin indispensable à notre rencontre des autres et de Dieu.
L’utilisation des mains
Nous pourrions penser que tous les gestes que nous posons pendant la messe sont dérisoires. Si simples qu’ils paraissent, ils tracent un chemin indispensable à notre rencontre des autres et de Dieu. Tous les gestes ont leur place et ont un sens.
La liturgie est un acte d’Église qui nous fait passer d’un statut individuel à celui de membre du Corps du Christ. Poser ensemble ces gestes participe à la construction de l’Eglise-Corps du Christ.
PGMR n°42 (8) : « Les attitudes communes à observer sont un signe de l’unité des membres de la communauté chrétienne rassemblée dans la sainte Liturgie ; en effet, elles expriment et développent l’esprit et la sensibilité des participants. »
► Se signer : La pratique du signe de croix se situe dans le prolongement direct de la pratique baptismale. A partir du milieu du IVè siècle, il est recommandé aux chrétiens de faire le signe de croix dans leur vie quotidienne. Saint Cyrille de Jérusalem : « Que nos doigts tracent hardiment son sceau sur notre front et qu’en toutes circonstances la croix soit tracée ».
Le signe de croix passe dans la liturgie au Moyen-Age. Notre «grand» signe de croix est apparu aux alentours du XIè siècle. Il résume l’essentiel de notre foi. Les quatre points de notre corps, ainsi marqués, nous rappellent notre baptême et nous font revêtir le Christ.
Les trois croix tracées avant la proclamation de l’Evangile, sur notre front, notre bouche et notre poitrine indiquent que la Parole de Dieu pénètre les profondeurs de notre conscience.
« Que cet évangile pénètre mon intelligence pour que je le comprenne, ma bouche pour que je le proclame, ma poitrine et mon cœur pour que j’en vive et que je l’aime ».
Les quatre points de notre corps, marqués lors du Signe de la croix, nous rappellent notre baptême et nous font revêtir le Christ.
► Se frapper la poitrine : Nous faisons ce geste pendant la prière pénitentielle. Rubrique du Missel Romain : « se frapper la poitrine » quand on dit : ‘oui j’ai vraiment péché’ » et avant la communion : « je ne suis pas digne de Te recevoir ».
Ce geste manifeste une prise de conscience de tout ce qui est égocentré et fermé en nous-même et dans nos actes. Se frapper la poitrine, c’est tenter d’éveiller, avec l’aide de la grâce, le centre de sa conscience.
► Joindre et ouvrir les mains : Jointes, avec parfois les doigts croisés, les mains ont leur propre langage et invitent au recueillement intérieur, à la vénération et à l’union intérieure avec Dieu. Les mains ouvertes, souvent levées vers le ciel, retrouvent une coutume de la prière chrétienne et signifient l’accueil et le don.
Le prêtre récite les bras ouverts : c’est la position de l’orant, adoptée par les chrétiens depuis les premiers siècles pour imiter le Christ les bras ouverts sur le bois de la croix. Ce geste, d’abord geste du prêtre, beaucoup de chrétiens l’ont adopté. Il accompagne tant la prière du Notre Père que la prière personnelle.
Les mains ouvertes, souvent levées vers le ciel, retrouvent une coutume de la prière chrétienne et signifient l’accueil et le don.
► Imposition : L’imposition des mains signifie la transmission de la Grâce ou le don de l’Esprit Saint. On peut imposer les mains à une seule personne ou à toute une assemblée. Le prêtre impose les mains dans tous les Sacrements : Baptême, Eucharistie, Mariage, lors du Sacrement de la Réconciliation. L’évêque impose les mains au confirmant ou à l’ordinant (diaconat ou sacerdoce).
► La posture de Communion : On peut rappeler les mots bien connus de saint Jean Chrysostome († 407) « Fais de ta main gauche un trône pour ta main droite, puisqu’elle doit recevoir le Roi ». Ce mouvement s’est progressivement transformé, au profit du geste du VIè au XXè siècle, de recevoir le Corps du Christ directement sur la langue.
Depuis la réforme de Vatican II, les 2 pratiques sont autorisées à la suite d’une instruction de la congrégation pour le culte divin en 1969.
Accueillir le Christ dans sa paume signifie que l’on reçoit le Christ ; le geste de porter à sa bouche exprime notre participation active à cette réception de la grâce et notre désir du don entier de notre vie corps, esprit et âme, à Celui que nous venons de recevoir.
Dès avant la célébration elle-même, il est bon de garder le silence dans l’église, à la sacristie… pour que tous se disposent à célébrer les saints mystères religieusement.
Le silence
PGMR 45. Le silence sacré sublime les différentes postures et fait partie de la célébration. Sa nature dépend du moment où il trouve place dans chaque célébration. Pendant l’acte pénitentiel et après l´invitation à prier, chacun se recueille ; après une lecture ou l´homélie, on médite brièvement ce qu´on a entendu ; après la communion, le silence permet l’action de grâce et la prière intérieure.
Dès avant la célébration elle-même, il est bon de garder le silence dans l’église, à la sacristie…., pour que tous se disposent à célébrer les saints mystères religieusement.
Le baiser
Les trois baisers de l’Eucharistie expriment la présence du Seigneur dans l’autel (1er baiser), dans sa Parole (2e baiser, de l’évangéliaire) et dans le peuple rassemblé (3e baiser de paix). Chaque baiser est un signe d’affection et de gratitude, de respect, de vénération, un témoignage d’adhésion et de réconciliation.
Évoqué dans les épîtres de saint Paul et de saint Pierre comme geste signifiant l’unité de la communauté chrétienne, il est passé en geste liturgique, comme ‘signe de paix’ – remplacé depuis la Covid par un regard ou un signe de mains.
Si les gestes sont humbles, parfois peu visibles, ils revêtent toute leur importance dans leur réalisation.
La prostration
C’est l’action de s’étendre sur le sol. C’est un geste liturgique rare. C’est la génuflexion poussée à l’extrême. On la retrouve au cours des rituels d’ordination ; il est refait par les prêtres lors de l’office du Vendredi Saint. C’est une attitude de prière intense qui manifeste l’humilité. Je reconnais mon néant devant Celui qui est Tout…
Conclusion : « Si les gestes sont humbles, parfois peu visibles, ils revêtent toute leur importance dans leur réalisation. Leur redonner du sens ne peut qu’aider à habiter la liturgie comme lieu de rencontre de Dieu et de son peuple. Nous avons intérêt à relire régulièrement tous ces gestes pour que ajustés et harmonieux, ils participent à la beauté de la liturgie ».
Mai 2025

L’art de célébrer : les postures de la liturgie
L’« art de célébrer » implique une participation active de tous les baptisés à la liturgie. À travers les postures fondamentales – se tenir debout, s’asseoir, s’agenouiller –, l’assemblée exprime son unité et approfondit sa relation au Christ ressuscité. Lire l’article

