Aimez vos ennemis !

Des personnes éprouvées par la souffrance psychique ou liée à un état dépressif se sont retrouvées pour échanger sur le passage de l’évangile selon saint Matthieu où Jésus appelle à… aimer nos ennemis. Echos des partages.

De l’évangile selon saint Matthieu (Mt 5, 43-48)

► Ecouter le passage d’évangile



Échos des partages :

  • « Tu aimeras… Priez pour …. » Moi, il m’est difficile d’aimer ma belle-famille qui m’a toujours détestée. D’abord parce que je ne suis pas bretonne, ni campagnarde, parce que j’ai le style intello, etc. Ils me disaient qu’ils ne m’aimaient pas. Mais moi, je n’arrive pas à les détester. Je ne peux pas dire que je les aime. Mais dans chaque être humain, il y a une part de divinité. Alors face à quelqu’un, qui que ce soit, je me dis « c’est un enfant de Dieu, comme toi »
  • Aujourd’hui encore, je rends service à une de ces personnes. Pourtant cela fait 35 ans que nous ne sommes pas vus. Ils ne me manquent pas. Mais s’il faut rendre service, je le fais. Je prie pour ça. C’est un texte qui me parle beaucoup. Je n’ai pas l’impression de devoir mériter une récompense.. Est-ce un don de Dieu ? Oui ! Une réponse à mes prières ? Oui sans doute.. Soyez parfaits… c’est autre chose !
  • Pour moi, ça a été un cheminement. J’ai détesté ma mère, mon beau-père. J’ai eu beaucoup de colère. Pas de haine, je ne leur ai pas souhaité de mal. Mais ils ont détruit ma sœur et ça je ne le supporte pas. Pourtant, je ne leur souhaite pas de mal. Maintenant, c’est de plus en plus facile. Ce sont des combats. Suite à une discussion avec une amie et avec une personne accompagnée pour la Communion et la Confirmation, avoir la crainte de Dieu, respecter Dieu, c’est facile. Mais il faut aller au-delà de la crainte, aller vers la charité. J’y arrive seulement car le Christ est en moi. Quand ma réaction première est la colère, c’est mon moi qui parle. Plus tard j’arrive à replacer les choses autrement. Je me demande comment le Christ regarde la personne.

J’y arrive seulement car le Christ est en moi. Quand ma réaction première est la colère, c’est mon moi qui parle.

  • C’est un chemin. On ne le fait pas tout seul. C’est l’amour de Dieu qui nous permet de faire tout ça. Ce qui m’importe, c’est suivre le chemin que Jésus nous propose. Faire un acte de charité. Le faire jusqu’au bout.
  • Accompagner la personne handicapée mentale, c’est la connaître, l’écouter, comme Jésus. Avec le recul, cet accompagnement me permet de réajuster ma relation à l’autre, de plus en plus en vérité. C’est ce qui nous permet d’être vivants et éventuellement heureux..
  • Tout à l’heure, je n’ai pas parlé du pardon. Je suis incapable de détester quelqu’un. On dit de moi que je pardonne tout. Est-ce une porte ouverte aux abus ? Je me pose encore la question.
  • La correction fraternelle existe pour éviter les abus, le harcèlement ou la perversité.
  • J’avais beaucoup d’ennemis quand j’étais au foyer. Je recevais des coups, j’ai connu des abus. On ne m’aimait pas. Je n’ai jamais réussi à pardonner, car ça avait trop d’ampleur. Quand tu pardonnes, souvent, il y a des abus sur des gens qui sont faibles. Des gens en profitent ! Au travail par exemple, j’ai reçu des pièces de voitures sur lesquelles on travaillait, juste au ras de mes yeux pour me blesser ! Une fille était handicapée des jambes. Quand on lui a dit qu’elle resterait en fauteuil, elle s’en est prise à moi, car je ne vois pas clair pour me défendre. La fille était derrière moi. Je collais des étiquettes. J’ai encore du mal à lui pardonner. La pièce était pointue et trempée dans l’encre.
  • L’important est d’avoir de l’apaisement, même si on ne va pas jusqu’au pardon.
  • Mon père était violent, même quand j’étais petite.

On dit de moi que je pardonne tout. Est-ce une porte ouverte aux abus ? Je me pose encore la question.

  • Est-ce que le fait d’arriver à vivre le plus sereinement possible au bout de plusieurs années, avec les souffrances subies, sans les oublier, est-ce une forme de pardon ?
  • Cela ne sert à rien de recuire la haine..
  • On reçoit des grâces aussi sans avoir rien fait pour !
  • Oui, comme quelqu’un qui va me tirer par les vêtements pour m’accompagner.
  • « Aimez vos ennemis … afin d’être les fils de votre Père qui est aux cieux » : l’objectif d’aimer ses ennemis, c’est d’être fils du Père qui est aux cieux. Fils du Père, comme dans le Notre Père où Jésus qui nous donne cette prière nous associe à son Père par le « Notre ». En même temps ce Père il est aux cieux, c’est-à-dire inatteignable, autre, toujours nouveau. Comme si le fait d’aimer ses ennemis nous faisait connaître une nouvelle facette du Père.
  • Mais c’est impossible en attendant tous les problèmes évoqués, les harcèlements, etc. sauf si on se laisse faire par l’Esprit d’amour. C’est ce qu’évoque pour moi la pluie mentionnée dans le texte, celle qui pleut sur tous. Être parfait c’est peut-être s’en laisser abreuver, pas forcément faire tout bien !
  • Quand j’étais enfant, je ne pleurais pas, je n’avais pas le droit. Sinon, c’était pire. Quand j’ai fait ma retraite de communion à l’âge adulte, quand je suis entrée dans la chapelle, je me suis effondrée, au sens propre, je suis tombée par terre et j’ai pleuré, pleuré, pleuré… Il faut s’autoriser à pleurer !
  • Moi, je ne peux plus pleurer, même si j’aimerais. Toutes mes larmes sont parties quand j’étais plus jeune !
  • Pareil pour moi. J’ai perdu mes parents à 6 mois d’intervalle. Et je n’ai pas pleuré.

En même temps ce Père il est aux cieux, c’est-à-dire inatteignable, autre, toujours nouveau. Comme si le fait d’aimer ses ennemis nous faisait connaître une nouvelle facette du Père.

  • Un réflexe humain, c’est de rendre ce qu’on nous a fait, de se venger. Mais on peut commencer par ignorer son ennemi, puis chercher le dialogue, voire montrer de la bienveillance. Aimer ses ennemis c’est un long chemin. Mais nos ennemis sont des créatures de Dieu. Manoukian avant sa mort disait n’avoir aucune haine contre le peuple allemand par qui il avait tant souffert.
  • « Pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font » disait Jésus à son Père sur la croix
  • Pour aimer son ennemi, on peut agir comme Jésus, car on se sait tellement aimé de lui que la puissance de son amour est en nous. Ça déborde et on ne se voit plus dans la haine.
  • Personnellement j’en ai eu de la haine, jusqu’à l’écrire à la personne concernée, en lui disant que je lui ferai savoir si je lui avais pardonné. Ça a été le cas dix ans après.
  • Une personne aimée m’a manipulée jusqu’à la rupture. J’ai eu beaucoup de colère, j’ai fui, mais mon amour pour elle a toujours été intact. C’était comme la révélation de l’amour que Dieu a pour nous.
  • Dieu est en tous, même dans les pires criminels
  • J’ai plutôt des ennemis institutionnels, qui sont opposés à ce que je pense. Par exemple le président algérien qui fait des ronds de jambes à Poutine
  • Pour ma part, j’ai ressenti ma sœur comme ennemie quand elle était plus jeune. Elle n’avait pas d’enfants, jalousait le fait que j’en aie. Elle a cherché à éloigner de moi mes enfants, au moment où j’étais remariée avec quelqu’un qui n’avait pas de lien avec mes enfants. C’est seulement maintenant que je le comprends. Mes enfants sont revenus vers moi mais cela a été une période douloureuse de 15 ans.
  • Ce n’est pas facile de parler de ses problèmes
  • C’est vrai. Il faut sentir chez l’autre une sensibilité, une empathie à la fragilité humaine. Et il faut que l’autre soit capable, prêt à recevoir l’indicible.

Recueilli par Geneviève Robert
Juin 2023

Illustrations : Bernadette Lopez
www.evangile-et-peinture.org
www.bernalopez.org


CONTACT

Groupe « Amitié-Espérance-Arc-en-Ciel »
du Val-d’Oise
Contact : ae-arcenciel@catholique95.fr

Prière de Maurice Zundel

Jeunes Unicef

« Seigneur, je viens Te demander la paix, la sagesse, la force. Je veux regarder aujourd’hui le monde avec des yeux tout remplis d’amour, être patient, compréhensif, doux et sage. Voir au-delà des apparences Tes enfants comme Tu les vois Toi-même, et ainsi ne voir que le bien en chacun. Ferme mes oreilles à toute calomnie, garde ma langue de toute malveillance, que seules les pensées qui bénissent demeurent en mon esprit. Que je sois si bienveillant et si joyeux que tous ceux qui m’approchent sentent Ta présence. Revêts-moi de Ta beauté, Seigneur, et qu’au long de ce jour je Te révèle. Amen »

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« Amitié Espérance – Arc en Ciel »

Amitié-Espérance-Arc-en-Ciel propose une présence auprès de personnes éprouvées par la souffrance psychique ou liée à un état dépressif.

Le mouvement rassemble des personnes qui témoignent de l’amitié et de l’Espérance au cœur même de leur fragilité. Il se veut un lieu d’accueil, d’écoute, de partage, de rencontres, au travers des expériences de la vie ordinaire. Il permet de cheminer au sein d’un groupe, composé d’accompagnants et de personnes fragiles. L’isolement peut ainsi être brisé. Le groupe est un espace convivial où chaque personne est accueillie, écoutée…

Pour que chacune conserve toute sa dignité et prenne sa place dans la société et dans l’Église. Ce mouvement diocésain est sous la responsabilité du Service de la Pastorale de la Santé du diocèse de Pontoise.


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